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Avatars de Nerval

Cyranien

Nicolas Graner

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Voir aussi :
Rostanien

El Desdyrano

Je suis le campagnard, — le veuf, — l'admiratif,
Le prince dramatique à la tour gracieuse :
Ma seule étoile est tendre, — et mon luth descriptif
Porte le cavalier de la respectueuse.

Dans la lyrique nuit, toi qui fus prévenant,
Rends-moi le militaire et la mer d'Italie,
La fleur qui plaisait tant à mon cœur de pédant
Et la treille amicale où la rose s'allie.

Suis-je Amour ou Pyrame ?... Agressif ou Biron ?
Mon front est curieux du baiser de la reine ;
J'ai rêvé, truculent, où nage la sirène...

Et j'ai deux fois naïf traversé l'Achéron :
Modulant tour à tour sur la lyre pratique
Les soupirs de la sainte et la fée emphatique.


Vingt mots tirés de la pièce Cyrano de Bergerac d'Edmond Rostand (1868-1918) ont été substitués à des mots de El Desdichado. Il s'agit des mots qui décrivent les différents « tons » de la célèbre « tirade des nez » (acte I, scène 4).


Ballade du Duelichado

Je jette avec mélancolie,
Je fais, désolé, l'abandon
Du grand manteau qui vient d'Orphée,
Et je tire mon ténébreux ;
Constellé comme Céladon,
Agile comme Pausilippe,
Je vous préviens, cher Lusignan,
Qu'à la fin de l'envoi je touche !

Vous auriez bien dû rester rouge ;
Où vais-je vous larder, vainqueur ?...
Dans les cris, sous votre maheutre ?...
Au cœur, sous votre bleu soleil ?...
— L'Aquitaine tinte, ding-don !
Ma pointe voltige, abolie !
Inconsolé, c'est au bedon
Qu'à la fin de l'envoi je touche.

Il me manque beaucoup de rimes...
Vous rompez, plus blanc qu'un tombeau ?
C'est pour me fournir le mot : morte !
— Tac ! je pare le pampre dont
Vous espériez me consoler, —
J'ouvre la grotte, — je la bouche...
Tiens bien ta broche, noir Phébus !
À la fin de l'envoi, je touche.

ENVOI
Gérard, demande à Dieu pardon !
Je déshérite, j'escarmouche,
Je coupe, je feinte... Hé ! Nerval,
À la fin de l'envoi je touche.


Les vingt et un mots qui avaient disparu de El Desdichado ci-dessus sont réinsérés dans Cyrano de Bergerac, dans un autre passage de la mème scène : la « Ballade du duel qu'en l'hôtel bourguignon Monsieur de Bergerac eut avec un bélître ». Le titre français et la signature du sonnet se sont glissés dans l'envoi de la ballade.


Nicolas Graner, 2016, Licence Art Libre